divendres, 2 de gener del 2015

La citadelle aveugle devient camp retranché. Mania mundi, les remparts du monde, sont une des expressions-clés de la rhétorique de Lucrèce. Certes, la grande affaire dans ce camp est, de faire taire l'espérance. Mais le renoncement méthodique d'Épicure se transforme en une ascèse frémissante qui se couronne parfois de malédictions. La piété, pour Lucrèce, est sans doute de « pouvoir tout regarder d'un esprit que rien ne trouble ».povo irmão zulu? zulu dawn com velhadas? caterpila? non será ...cá ter pila Épicure juge que, puisqu'il faut mourir, le silence de l'homme prépare mieux à ce destin que les paroles divines. Le long effort de ce curieux esprit s'épuise à élever des murailles autour de l'homme, à remanteler la citadelle et à étouffer sans merci l'irrépressible cri de l'espoir humain. Alors, ce repli straté- gique étant accompli, alors seulement, Épicure, comme un dieu au milieu des hommes, chantera victoire dans un chant qui marque bien le caractère défensif de sa révolte. « J'ai déjoué tes embûches, ô destin, j'ai fermé toutes les voies par lesquelles tu pouvais m'atteindre. Nous ne nous laisserons vaincre ni par toi, ni par aucune force mauvaise. Et quand l'heure de l'inévitable départ aura sonné, notre mépris pour ceux qui s'agrippent vainement à l'existence éclatera dans ce beau chant : Ah ! que dignement nous avons vécu diz o roto ao nu....

 On y parle du « premier crime de la religion »,
Iphigénie et son innocence égorgée ; de ce trait divin qui « souvent
passe à côté des coupables et va, par un châtiment immérité, priver de
la vie des innocents ». Si Lucrèce raille la peur des châtiments de l'autre
monde, ce n'est point, comme Épicure, dans le mouvement d'une
révolte défensive, mais par un raisonnement agressif : pourquoi le mal
serait-il châtié, puisque nous voyons assez, dès maintenant, que le
bien n'est pas récompensé ?
Épicure lui-même, dans l'épopée de Lucrèce, deviendra le rebelle
magnifique qu'il n'était pas. « Alors qu'aux yeux de tous, l'humanité
traînait sur terre une vie abjecte, écrasée sous le poids d'une religion
dont le visage se montrait du haut des régions célestes, menaçant les
mortels de son aspect horrible, le premier, un Grec, un homme, osa
lever ses yeux mortels contre elle, et contre elle se dresser... Et par là,
la religion est à son tour renversée et foulée aux pieds, et nous, la victoire
nous élève jusqu'aux cieux. » On sent ici la différence qu'il peut
y avoir entre ce blasphème nouveau et la malédiction antique. Les hé-
ros grecs pouvaient désirer devenir des dieux, mais en même temps
que les dieux déjà existants. Il s'agissait alors d'une promotion.
L'homme de Lucrèce, au contraire, procède à une révolution. En niant
les dieux indignes et criminels, il prend lui-même leur place. Il sort du
camp retranché et commence les premières attaques contre la divinité au nom de la douleur humaine. Dans l'univers antique, le meurtre est
l'inexplicable et [50] l'inexpiable. Chez Lucrèce, déjà, le meurtre de
l'homme n'est qu'une réponse au meurtre divin. Et ce n'est pas un hasard
si le poème de Lucrèce se termine sur une prodigieuse image de
sanctuaires divins gonflés des cadavres accusateurs de la peste.
Ce langage nouveau ne peut se comprendre sans la notion d'un
dieu personnel qui commence à se former lentement dans la sensibilité
des contemporains d'Épicure, et de Lucrèce. C'est au dieu personnel
que la révolte peut demander personnellement des comptes. Dès qu'il
règne, elle se dresse, dans sa résolution la plus farouche et prononce le
non définitif. Avec Caïn, la première révolte coïncide avec le premier
crime. L'histoire de la révolte, telle que nous la vivons aujourd'hui, est bien plus celle des enfants de Caïn que des disciples de Prométhée. En
ce sens, c'est le Dieu de l'Ancien Testament, surtout, qui mobilisera
l'énergie révoltée. Inversement, il faut se soumettre au Dieu d'Abraham,
d’Isaac et de Jacob quand on a parcouru, comme Pascal, la carrière
de l'intelligence révoltée. L’âme qui doute le plus aspire au plus
grand jansénisme.
De ce point de vue, le Nouveau Testament peut être considéré
comme une tentative de répondre, par avance, à tous les Caïn du monde,
en adoucissant la figure de Dieu, et en suscitant un intercesseur
entre lui et l'homme. Le Christ est venu résoudre deux problèmes
principaux, le mal et la mort, qui sont précisément les problèmes des
révoltés. Sa solution a consisté d'abord à les prendre en charge. Le
dieu homme souffre aussi, avec patience. Le mal ni la mort ne lui sont
plus absolument imputables, puisqu'il est déchiré et meurt. La nuit du
Golgotha n'a autant d'importance dans l'histoire des hommes que parce
que dans ces ténèbres la divinité, abandonnant ostensiblement ses
privilèges traditionnels, [51] a vécu jusqu'au bout, désespoir inclus,
l'angoisse de la mort. On s'explique ainsi le Lama sabactani et le doute
affreux du Christ à l'agonie. L'agonie serait légère si elle était soutenue
par l'espoir éternel. Pour que le dieu soit un homme, il faut qu'il
désespère. Le gnosticisme, qui est le fruit d'une collaboration grécochrétienne,
a tenté pendant deux siècles, en réaction contre la pensée
judaïque, d'accentuer ce mouvement. On connaît la multiplicité d'intercesseurs
imaginés par Valentin, par exemple Mais les éons de cette
kermesse métaphysique jouent le même rôle que les vérités intermé-
diaires dans l'hellénisme. Ils visent à diminuer l'absurdité d'un tête-à-
tête entre l'homme misérable et le dieu implacable. C'est le rôle, en
particulier, du deuxième dieu cruel et belliqueux de Marcion. Ce dé-
miurge a créé le monde fini et la mort. Nous devons le haïr en même
temps que nous devons nier sa création, par l'ascèse, jusqu'à la détruire
grâce à l'abstinence sexuelle. Il s'agit donc d'une ascèse orgueilleuse
et révoltée. Simplement, Marcion dérive la révolte vers un dieu infé-
rieur pour mieux exalter le dieu supérieur. La gnose par ses origines
grecques reste conciliatrice et tend à détruire l'héritage judaïque dans le christianisme. Elle a aussi voulu éviter, à l'avance, l'augustinisme,
dans la mesure où celui-ci fournit des arguments à toute révolte. Pour
Basilide, par exemple, les martyrs ont péché, et le Christ lui-même,
puisqu'ils souffrent. Idée singulière, mais qui vise à enlever son injustice
à la souffrance. À la grâce toute puissante et arbitraire, les gnostiques
ont voulu seulement substituer la notion grecque d'initiation qui
laisse à l'homme toutes ses chances. La foule des sectes, chez les
gnostiques de la deuxième génération, traduit cet effort multiple et
acharné de la pensée grecque pour rendre plus accessible le monde
chrétien, et ôter ses raisons à une révolte que l'hellénisme [52] considérait
comme le pire des maux. Mais l'Église a condamné cet effort et,
le condamnant, elle a multiplié les révoltés.
Dans la mesure où la race de Caïn a triomphé de plus en plus, au
long des siècles, il est possible de dire ainsi que le dieu de l'Ancien
Testament a connu une fortune inespérée. Les blasphémateurs, paradoxalement,
font revivre le dieu jaloux que le christianisme voulait
chasser de la scène de l'histoire. L'une de leurs audaces profondes a
été justement d'annexer le Christ lui-même à leur camp, en arrêtant
son histoire au sommet de la croix et au cri amer qui précéda son agonie.
Ainsi se trouvait maintenue la figure implacable d'un dieu de haine,
mieux accordé à la création telle que les révoltés la concevaient.
Jusqu'à Dostoïevski et Nietzsche, la révolte ne s'adresse qu'à une divinité
cruelle et capricieuse, celle qui préfère, sans motif convaincant  le
sacrifice d'Abel à celui de Caïn et qui, par là, provoque le premier
meurtre. Dostoïevski, en imagination, et Nietzsche, en fait, étendront
démesurément le champ de la pensée révoltée et demanderont des
comptes au dieu d'amour lui-même. Nietzsche tiendra Dieu pour mort
dans l'âme de ses contemporains. Il s'attaquera alors, comme Stirner
son prédécesseur, à l'illusion de Dieu qui s'attarde, sous les apparences
de la morale, dans l'esprit de son siècle. Mais, jusqu'à eux, la pensée
libertine, par exemple, s'est bornée à nier l'histoire du Christ (« ce plat
roman », selon Sade) et à maintenir, dans ses négations mêmes, la tradition
du dieu terrible

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